• 16 Juil 2025
  • Russie
  • Communiqué de presse

Russie. Les propositions de modification de lois contre l’extrémisme renforcent les attaques visant l’opposition

Réagissant aux récentes modifications du droit russe, en particulier à un nouveau projet de loi permettant de désigner toute communauté ou organisation comme « extrémiste » sans décision de justice, et à un autre projet de loi prévoyant des sanctions administratives pour le simple fait de rechercher ou de consulter des « contenus extrémistes » en ligne, Marie Struthers, directrice du programme Europe de l’Est et Asie centrale d’Amnistie internationale, a déclaré :

« Une fois de plus, les autorités russes déguisent leur persécution incessante de l’opposition en la présentant comme une lutte contre l’"extrémisme", au moyen d’un texte vague et trop général qui se prête à des interprétations abusives et à l’arbitraire.

« Si ce projet de loi sur l’"extrémisme" est adopté, n’importe quel groupe de personnes - même un fil de discussion en ligne ou un cercle d’amis - pourra être désigné et poursuivi comme "extrémiste" si un seul de ses membres a été condamné pour "extrémisme", comme l’ont été de nombreuses personnes ayant critiqué le gouvernement. Cela donnera aux forces de l’ordre la possibilité semble-t-il illimitée de mettre en œuvre un large dispositif et de poursuivre un nombre toujours plus grand de personnes pour des associations, même lointaines, avec de prétendus "extrémistes".

« Une des autres propositions est tout aussi dangereuse. Si elle était adoptée, elle rendrait la recherche ou la lecture de contenus "extrémistes" en ligne passibles de poursuites. Compte tenu du fait que dans la Russie d’aujourd’hui, les contenus "extrémistes" peuvent aller d’un livre "promouvant les relations entre personnes de même sexe" à des messages publiés sur les réseaux sociaux par des groupes d’opposition, cette modification aurait pour effet de couper la société russe de toute information ou opinion jugée "dangereuse" par les autorités. 

« Ces modifications constituent une violation flagrante des obligations internationales de la Russie et de sa propre Constitution, qui garantit à chacun·e le droit à la vie privée et à la liberté d’association et d’expression, y compris l’accès à l’information. Ces textes ne doivent pas entrer en vigueur. »

Complément d’information

Le 15 juillet, la Douma d’État a adopté une nouvelle série de modifications renforçant encore davantage la législation « anti-extrémisme » de la Russie. Parmi les nouvelles règles, tout groupe - même les groupes informels - peut désormais être désigné comme « organisation extrémiste » si un seul de ses membres a été condamné pour avoir créé une « association extrémiste » ou y avoir pris part (article 282.1 du Code pénal). Cette disposition supprime la condition, en vigueur précédemment, qu’une décision de justice distincte ait été prononcée, ce qui permet aux autorités d’interdire arbitrairement des groupes entiers sur la base de la condamnation antérieure d’un seul membre.

Les législateurs ont par ailleurs proposé l’ajout d’un nouvel article au Code des infractions administratives, qui prévoit l’imposition d’une amende pouvant aller jusqu’à 5 000 roubles (environ 65 dollars) contre les personnes qui « recherchent ou consultent sciemment des documents extrémistes », notamment par le biais d’un réseau privé virtuel (VPN). Ce projet d’article n’explique pas comment une activité de ce type serait détectée, ce qui soulève de graves inquiétudes quant au manque de clarté et de précision sur les comportements criminalisés, et quant à la possibilité d’une surveillance et d’un accès illégaux sur les appareils de particuliers.