Arabie saoudite/ONU. L’accord sur le travail doit aboutir à des réformes en profondeur pour changer la donne pour les travailleuses et travailleurs migrants

En réaction à l’annonce d’une troisième phase de coopération entre le gouvernement d’Arabie saoudite et l’Organisation internationale du travail (OIT) afin de faire avancer les réformes en faveur de conditions de travail décentes, Iain Byrne, directeur du programme Justice économique et sociale d’Amnistie internationale, a déclaré :
« L’annonce faite aujourd’hui reconnaît la nécessité de réformes du droit du travail pour les personnes migrantes qui travaillent en Arabie saoudite, mais on ignore toujours quelle sera la profondeur de ce programme et quel impact il aura sur les droits, la santé et les ressources de millions de travailleuses et de travailleurs qui dépendent de sa capacité à être bien plus qu’une façade.
« Les organisations de défense des droits humains et les syndicats demandent depuis longtemps un processus sérieux et ambitieux de réforme du droit du travail pour mettre fin à la grave exploitation des travailleuses et travailleurs migrants en Arabie saoudite. La plainte déposée par des syndicats mondiaux contre ce pays auprès de l’OIT le jour même de la signature de l’accord est révélatrice de l’ampleur des efforts que l’Arabie saoudite doit encore fournir pour protéger les droits de ces personnes.
« Pour que ce programme change vraiment la donne pour les travailleuses et travailleurs migrants, il doit notamment s’attaquer pleinement aux principales caractéristiques du système abusif de parrainage, la kafala, qui les rend totalement dépendants de leurs employeurs. Il faut également qu’il remédie aux limites extrêmes pesant sur la liberté d’expression et d’association dans le pays, ainsi qu’au manque d’accès des ONG et des syndicats qui empêche de suivre en toute indépendance la mise en œuvre de tout accord sur le travail, ce qui nuit d’autant plus à sa crédibilité et à son efficacité.
« Nous appelons les autorités saoudiennes et l’OIT à rendre publics tous les aspects de cette coopération et à permettre un suivi indépendant de sa mise en œuvre. Pour protéger suffisamment les droits des 13,4 millions de travailleuses et travailleurs migrants du pays, cet accord doit aboutir à une refonte complète du système d’emploi actuel et mettre fin à la culture d’impunité qui prévaut. »
Complément d’information
Le 4 juin 2025, la Confédération syndicale internationale (CSI) a déposé une plainte qui fera date contre l’Arabie saoudite auprès de l’OIT, en mettant en avant les violations massives des droits des travailleuses et travailleurs migrants dans ce pays qui doit accueillir la Coupe du monde de la FIFA en 2034. Le Conseil d’administration de l’OIT examine déjà une plainte déposée il y a un an par un autre syndicat mondial, l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB), accusant l’Arabie saoudite de violations de la Convention de l’OIT sur le travail forcé.
En mai, Amnistie internationale a publié un rapport qui rend compte de l’expérience de plus de 70 femmes kenyanes embauchées comme employées de maison en Arabie saoudite, qui se sont retrouvées piégées dans des conditions souvent assimilables à du travail forcé.