Porto Rico. Les autorités doivent assurer la protection maximale des droits humains face aux opérations migratoires discriminatoires

Depuis l’entrée en fonctions du gouvernement de Donald Trump, les opérations migratoires à Porto Rico, caractérisées par un profilage racial et des détentions arbitraires, ont connu une augmentation inédite, le tout sous le regard indifférent de la gouverneure Jenniffer González Colón. Depuis janvier 2025, le Service de contrôle de l’immigration et des douanes (ICE) a arrêté au moins 568 personnes, dont la majorité d’origine dominicaine. Les droits humains de toutes les personnes à Porto Rico, indépendamment de leur statut migratoire, doivent être respectés et garantis.
« La gouverneure Jenniffer González Colón doit prendre le parti de la dignité humaine. Aucune complicité ou collaboration avec des politiques qui ont fait la preuve de leur caractère cruel et arbitraire aux États-Unis et qui déchirent aujourd’hui les populations et quartiers ouvriers de Porto Rico ne saurait être acceptée », a déclaré Ana Piquer, directrice pour les Amériques à Amnistie internationale.
Amnistie internationale a recensé les injustices et les conséquences des mesures en matière de migration et d’asile prises par le président Donald Trump et le scénario fait écho à de nombreuses préoccupations et condamnations formulées par des organisations de la société civile portoricaines. Celles-ci concernent notamment le profilage racial, les détentions arbitraires, les violations des garanties d’une procédure régulière et l’absence de protection juridique pour les personnes arrêtées. Des informations en accès libre consultées par l’organisation indiquent que les opérations migratoires ont visé des quartiers où vivent traditionnellement des personnes migrantes et ouvrières, qui sont harcelées chez elles, en route pour le travail ou directement sur leur lieu de travail. Les arrestations ont entraîné la séparation de familles et, dans certains cas, des personnes dont le statut permettait le séjour à Porto Rico ont été touchées.
Une fois arrêtées, la situation de ces personnes est par ailleurs floue. Des organisations de la société civile ont indiqué à Amnistie internationale que de nombreuses personnes arrêtées sont envoyées dans des centres de détention aux États-Unis pour être ensuite expulsées, ce qui entrave encore davantage leur protection juridique et leur communication avec leurs proches. Parfois, plusieurs jours s’écoulent avant que le lieu où se trouvent ces personnes ne soit indiqué par l’outil de localisation en ligne des personnes détenues par l’ICE. D’autres personnes, poussées par la peur et la précarité, sont expulsées de Porto Rico après avoir choisi de recourir au mécanisme d’« expulsion volontaire » prévu par la loi relative à la migration.
Ces événements ont instauré un climat de terreur qui a poussé certaines personnes migrantes à cesser leurs activités quotidiennes, comme se rendre à l’école ou au travail, chercher à obtenir des soins médicaux ou s’approvisionner en nourriture. Des personnes victimes d’infractions, notamment des femmes victimes de violence fondée sur le genre, ont renoncé à porter plainte ou à solliciter une protection temporaire, de peur d’être arrêtées et expulsées. Des organes de presse et des organisations de défense des droits humains ont par ailleurs signalé la mort d’Antonio Báez, qui serait décédé en essayant d’éviter une opération des autorités fédérales.
Dans ce contexte, le gouvernement portoricain doit veiller à ce que les services publics soient assurés sans discrimination, de sorte à garantir le droit à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, à l’accès à la justice, à la protection juridique, ainsi que la protection des revenus des personnes migrantes risquant d’être arrêtées. Pour cela, il doit recourir à toutes les mesures juridiques, administratives et budgétaires à sa disposition pour honorer ses obligations en matière de droits humains.
« Toutes les autorités étatiques de Porto Rico doivent s’abstenir de toute officialisation de la collaboration avec le Service de contrôle de l’immigration et des douanes et avec les politiques migratoires des États-Unis. Elles doivent au contraire mettre en place des garanties pour veiller à ce qu’aucune information en la possession du gouvernement local ne soit utilisée contre les personnes migrantes », a déclaré Liza Gallardo, directrice d’Amnistie internationale Porto Rico.
Les autorités portoricaines doivent éviter toute avancée des politiques relatives à la migration discriminatoires et contraires au droit de solliciter l’asile qu’encourage le gouvernement de Donald Trump. Comme le prévoient les normes internationales en la matière, les autorités doivent mettre en place des moyens d’empêcher que des opérations de contrôle migratoire soient organisées dans des écoles, des tribunaux, des églises, des services publics essentiels, notamment de santé, des services de l’immigration et d’autres espaces publics. En outre, il doit être interdit aux prestataires de services de fournir, échanger et partager avec les autorités migratoires des informations sur le statut au regard de l’immigration des personnes migrantes.
Amnistie internationale se joint au front d’organisations de la société civile opposées aux politiques migratoires des États-Unis et continuera de suivre et mettre en lumière la situation des droits humains des personnes migrantes et en quête d’asile à Porto Rico.