Chine. Les autorités doivent mettre fin aux ingérences dans les pratiques religieuses tibétaines alors que le dalaï-lama annonce un plan de succession

Réagissant à la présentation par le dalaï-lama, à l’approche de son 90e anniversaire, du processus pour sa succession spirituelle, alors que les autorités chinoises s’efforcent de longue date de contrôler la nomination des dirigeants bouddhistes tibétains, Sarah Brooks, directrice pour la Chine à Amnistie internationale, a déclaré :
« Les efforts déployés par les autorités chinoises pour contrôler le choix du prochain dalaï-lama constituent une attaque directe contre le droit à la liberté de religion ou de conviction. Les bouddhistes tibétains, comme toutes les communautés religieuses, doivent pouvoir choisir leurs chefs spirituels sans contrainte ni ingérence de la part des autorités.
« Les autorités chinoises se livrent de très longue date à une répression systématique de la liberté de religion et à un contrôle toujours plus étroit du bouddhisme tibétain. Par exemple, en 1995, les autorités ont soumis à une disparition forcée Gedhun Choekyi Nyima, le garçon reconnu par le dalaï-lama comme étant le panchen-lama ; Pékin n’a toujours pas expliqué de manière appropriée le sort qui lui a été réservé et le lieu où il se trouve.
« Ce climat de secret, auquel s’ajoute l’imposition de nombreux dignitaires religieux nommés par l’État dans le bouddhisme tibétain, met en évidence une inquiétante politique de contrôle par l’État de la religion en Chine.
« Les autorités chinoises doivent immédiatement mettre fin à l’ingérence politique dans les pratiques religieuses tibétaines et cesser de faire de la succession religieuse un instrument de contrôle et de coercition. Les autorités doivent respecter le droit de toutes les personnes à la liberté de religion et de conviction. Elles doivent également autoriser immédiatement un accès indépendant à Gedhun Choekyi Nyima et faire le nécessaire pour mettre fin aux 30 années d’impunité pour sa disparition. »
Complément d’information
Le 14e dalaï-lama, le chef spirituel tibétain, a annoncé mercredi 2 juillet à Dharamsala , en Inde, qu’il aura un successeur après sa mort. Il a déclaré que seul le Gaden Phodrang Trust, qu’il a fondé, était habilité à reconnaître sa future réincarnation.
La politique du gouvernement chinois affirme que toutes les réincarnations des « bouddhas vivants » bouddhistes tibétains doivent être approuvées par les autorités étatiques. Cette position est détaillée dans des instruments juridiques tels que les Mesures de 2007 sur la gestion de la réincarnation des bouddhas vivants, qui exigent un contrôle officiel et l’approbation de plusieurs niveaux de gouvernement en fonction de l’influence du dignitaire religieux en question.
Dans son livre blanc de mars 2025, intitulé Les droits humains dans le Xizang dans la nouvelle ère, le gouvernement chinois a réaffirmé cette position, déclarant que le système de réincarnation fonctionne « sous la direction des associations bouddhistes et l’administration du gouvernement ». Le document s’enorgueillit du fait que 93 bouddhas vivants réincarnés ont été confirmés après approbation du gouvernement à la fin de l’année 2024, soulignant que le contrôle de l’État représente un progrès majeur.
Gedhun Choekyi Nyima avait six ans lorsque le dalaï-lama l’a reconnu comme étant le 11e panchen-lama, en mai 1995. Trois jours plus tard, les autorités chinoises ont soumis l’enfant et sa famille à une disparition forcée. Depuis, il n’a jamais été vu en public. Le gouvernement chinois a depuis affirmé de manière vague qu’il « menait une vie normale ».
Aux termes du droit international relatif aux droits humains, notamment de l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), toute personne a le droit, individuellement ou en commun, d’adopter et de manifester une religion ou une conviction de son choix sans subir de contrainte. Si la Chine a uniquement signé le PIDCP, sans le ratifier, elle reste cependant tenue de ne pas aller à l’encontre de l’objet et du but de ce traité. La disparition forcée constitue une violation continue du droit international, tant que le sort de la personne concernée n’a pas été élucidé.
Le Comité des droits de l’enfant [ONU] et le Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires [ONU] ont demandé à plusieurs reprises des informations sur le lieu où se trouvait Gedhun Choekyi Nyima. Le rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction a par ailleurs souligné que les communautés religieuses doivent être libres de choisir leurs dirigeant·e·s sans ingérence de l’État.