• 22 Aoû 2025
  • Arabie saoudite
  • Communiqué de presse

Arabie saoudite. Une exécution déplorable révèle la vacuité de la promesse de ne plus appliquer la peine de mort pour les personnes mineures

En réaction aux informations indiquant que les autorités saoudiennes ont exécuté Jalal Labbad le 21 août 2025 pour des infractions qu’il aurait commises avant l’âge de 18 ans, Bissan Fakih, chargée de campagne sur le Moyen-Orient à Amnistie internationale, a déclaré :

« L’exécution de Jalal Labbad par l’Arabie saoudite est déplorable et souligne l’effet dévastateur du recours implacable des autorités à la peine de mort au mépris total d’une des interdictions les plus absolues de son utilisation. L’application de la peine capitale contre des personnes qui étaient mineures au moment des faits pour lesquels elles sont jugées est interdite par le droit international relatif aux droits humains et le droit international coutumier.

« Son exécution est le point d’orgue tragique d’une multitude de violations des droits humains commises par les autorités saoudiennes, allant de sa détention arbitraire à son procès d’une iniquité flagrante. Jalal Labbad a été privé d’accès à une assistance juridique pendant sa détention provisoire et a déclaré au tribunal qu’on l’avait torturé, roué de coups et soumis à des décharges électriques pour qu’il « avoue » sa culpabilité. Le tribunal n’a pas enquêté sur ces allégations de torture et d’autres mauvais traitements. Cette liste honteuse de violations rend son exécution arbitraire au regard du droit international.

« Les autorités saoudiennes doivent remettre le corps de Jalal Labbad à ses proches dans les meilleurs délais pour leur permettre de lui offrir un enterrement digne et de pleurer sa mort dans le respect de leurs pratiques culturelles et religieuses. Elles retiennent en effet les corps de personnes exécutées, infligeant une souffrance immense et un traumatisme supplémentaire à leurs familles.

« À la suite de l’exécution de Jalal Labbad, Amnistie internationale est gravement préoccupée pour la vie d’autres jeunes hommes sous le coup d’une condamnation à mort pour des infractions qu’ils auraient commises avant l’âge de 18 ans. Parmi eux, Abdullah al Derazi, membre de la minorité chiite, a vu sa peine confirmée en secret et a subi une multitude de violations des droits humains. Des expert·e·s des Nations unies ont conclu que sa détention et celle d’autres jeunes hommes étaient arbitraires. Il est grand temps que l’Arabie saoudite mette un terme à son application scandaleuse de la peine de mort, qui comprend l’exécution de personnes pour des infractions commises lorsqu’elles étaient mineures et laisse des familles déchirées et anéanties. »

Complément d’information

Jalal Labbad, né le 3 avril 1995, a été arrêté en raison de sa participation à des manifestations contre le traitement de la minorité chiite d’Arabie saoudite en 2011 et 2012 à Al Qatif ainsi que de sa présence aux obsèques de personnes tuées par les forces de sécurité. Le 1er août 2022, le Tribunal pénal spécial l’a déclaré coupable et condamné à mort pour des infractions qu’il était accusé d’avoir commises à 16 ans et 17 ans. Une cour d’appel a confirmé la condamnation de Jalal Labbad le 4 octobre 2022. En octobre 2023, Amnistie internationale a reçu des informations fiables indiquant que la Cour suprême avait confirmé sa peine de mort en secret.

Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu que la détention de Jalal Labbad, d’Abdullah al Derazi, de Yusuf al Manasif, de Jawad Qureiris et de Hassan al Faraj était arbitraire. Ces cinq jeunes hommes font partie de la minorité chiite et avaient moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés.

Un frère de Jalal Labbad, Fadel Labbad, a été exécuté en 2019. Un autre de ses frères, Mohammad Labbad, a été condamné à mort en octobre 2022. Après un nouveau procès, il a de nouveau été condamné à mort en février 2025.

Les autorités saoudiennes ont condamné à maintes reprises des membres de la minorité chiite à la peine de mort dans le but de faire taire la contestation dans la province de l’Est. Le 25 février 2025, des sources dignes de confiance ont informé Amnistie internationale que Yusuf al Manasif, Jawad Qureiris et Hassan al Faraj avaient été rejugés et de nouveau condamnés à mort et que leurs procédures étaient en instance devant la Cour suprême. Jalal Labbad et Abdullah al Derazi n’avaient pas encore été rejugés à ce moment-là.

En mai 2023, la Commission saoudienne des droits humains a affirmé dans une lettre à Amnistie internationale : « L’imposition de la peine de mort à des mineurs pour des infractions relevant du taazir a été complètement abolie ». Les infractions relevant du taazir [peine discrétionnaire], comme celles dont Jalal Labbad avait été déclaré coupable, ne sont pas passibles de la peine capitale selon la charia (loi islamique).

L’interdiction du recours à la peine capitale contre des personnes qui étaient âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés est inscrite dans plusieurs instruments de droit international, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), ainsi que dans le droit international coutumier, et constitue une norme impérative du droit international général (jus cogens).

Amnistie internationale est opposée en toutes circonstances et de manière inconditionnelle à la peine de mort, qui constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit, ainsi qu’une violation du droit à la vie.