• Iran

Un jeune iranien risque d'être exécuté dans moins de 72 heures

CONTEXTE

Hossein Shahbazi, âgé de 22 ans, risque d’être exécuté de manière imminente pour un crime qui s’est déroulé alors qu’il n’avait que 17 ans. Son procès a été entaché d’irrégularités flagrantes ; ses « aveux » extorqués sous la torture ont notamment été retenus pour le déclarer coupable. Les autorités iraniennes ont prévu de l’exécuter dimanche 28 mai, en violation du droit international relatif aux droits humains, qui interdit strictement de recourir à la peine de mort contre une personne qui était mineure au moment des faits qui lui sont reprochés.

Après son arrestation et sa détention pendant 11 jours par le Service des enquêtes de la police iranienne (Agahi) à Chiraz, Hossein Shahbazi a été transféré dans un centre de détention pour mineurs mais n’a pas pu contacter sa famille pendant plusieurs jours, avant de pouvoir finalement recevoir la visite de sa mère. Selon des sources qui connaissent son cas, lors de cette visite, il avait des contusions au visage et semblait avoir perdu du poids. Il est actuellement détenu à la prison d’Adelabad, à Chiraz.

Le système judiciaire pénal iranien facilite la violation du droit à la vie, perpétue le cycle de la violence et cherche à faire porter la responsabilité des homicides d’êtres humains cautionnés par l’État sur les personnes qui ont perdu un proche lors d’un meurtre. En vertu du droit iranien, le principe de qisas (réparation) est une théorie s’apparentant à la loi du talion, qui consiste à faire subir aux personnes reconnues coupables de meurtre le même sort que celui subi par la victime – c’est-à-dire la mort. La loi donne ce pouvoir aux proches de la victime du meurtre, qui peuvent exiger et faire appliquer la condamnation à mort de l’accusé·e ou lui accorder leur pardon en échange du « prix du sang » (diya). Dans les affaires impliquant la condamnation à mort de personnes reconnues coupables de crimes commis alors qu’elles étaient mineures sur la base du principe de qisas, comme celle de Hossein Shahbazi, les autorités iraniennes ont souvent trompé l’opinion publique et la communauté internationale en affirmant que ce n’était pas à elles que revenait la décision finale de procéder ou non à l’exécution et que tout ce qu’elles pouvaient faire était de jouer un rôle de médiateur dans les négociations pour encourager la famille de la victime à accorder son pardon en échange de la diya. Amnistie internationale tient à souligner que ce discours est malhonnête et témoigne d’un manque fondamental de respect des droits de l’enfant de la part des autorités iraniennes. Les tribunaux iraniens condamnent à mort des personnes pour des crimes commis lorsqu’elles étaient mineures, en violation flagrante du droit international, puis rejettent les demandes répétées de commutation de ces peines.

L’Iran a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la Convention relative aux droits de l’enfant, qui interdisent formellement le recours à la peine capitale contre les personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés. Cette interdiction est également reconnue comme norme impérative du droit international coutumier, ce qui signifie qu’elle est acceptée et reconnue par la communauté internationale des États en tant que norme contraignante pour tous les États et à laquelle il ne peut être dérogé. Amnistie internationale s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution.

 

LETTRE À ENVOYER

Monsieur le Responsable du pouvoir judiciaire,

Hossein Shahbazi, 22 ans, risque une exécution imminente pour la cinquième fois dans la prison d’Adelabad, à Chiraz (province du Fars), pour un crime qui s’est déroulé alors qu’il n’avait que 17 ans. Sa famille a épuisé toutes les voies de recours pour empêcher son exécution et il semble que les autorités iraniennes sont déterminées à y procéder dimanche 28 mai. Son exécution a déjà été fixée à quatre reprises puis repoussée à chaque fois à la suite de protestations publiques.

Arrêté le 30 décembre 2018, Hossein Shahbazi n’a pas été autorisé à consulter un avocat ni à communiquer avec sa famille pendant 11 jours alors qu’il était interrogé dans un centre de détention du Service des enquêtes de la police iranienne (Agahi) à Chiraz. Il a indiqué avoir subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements au cours de cette période. Le 13 janvier 2020, à l’issue d’un procès manifestement inique lors duquel ses « aveux » extorqués sous la contrainte ont été retenus contre lui, la troisième chambre du tribunal pénal n° 1 de la province du Fars l’a déclaré coupable de meurtre et l’a condamné à mort. Sa condamnation a été confirmée par la Cour suprême le 16 juin 2020. Cette même instance a rejeté sa demande de révision judiciaire déposée en 2021. Dans le jugement de la Cour suprême, qu’Amnistie internationale a pu examiner, les magistrats ont noté qu’il avait moins de 18 ans au moment du crime commis, tout en soutenant qu’il avait atteint à ce moment-là « un développement et une maturité psychologiques », selon l’examen réalisé par l’Organisation iranienne de médecine légale, une institution médico-légale sous la tutelle du pouvoir judiciaire, et que, par conséquent, il méritait la condamnation à mort prononcée. Cet avis, comme d’autres rendus précédemment par l’Organisation iranienne de médecine légale confirmant la « maturité » de personnes mineures au moment des faits, met en lumière une fois de plus la complicité de médecins affiliés à cette institution dans l’offensive contre le droit à la vie des mineurs en Iran.

L’Iran continue de condamner à mort et d’exécuter des personnes qui avaient moins de 18 ans au moment des faits pour lesquels elles ont été condamnées, en violation de ses obligations au titre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et de la Convention relative aux droits de l’enfant.

Je vous appelle à suspendre immédiatement l’exécution programmée de Hossein Shahbaz, à annuler sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort, et à lui accorder un nouveau procès qui soit équitable, pleinement conforme au droit international et aux principes de la justice pour mineurs, et qui exclue les « aveux » obtenus sous la contrainte et le recours à la peine capitale. Je vous prie instamment de le protéger contre tout nouvel acte de torture ou autre mauvais traitement, d’enquêter sur ses allégations de torture et de traduire en justice tous les responsables présumés dans le cadre de procédures équitables, sans recourir à la peine de mort. Je vous demande en outre, d’instaurer immédiatement un moratoire sur toutes les exécutions et d'interdire le recours à la peine de mort contre des personnes âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur sont reprochés, conformément aux obligations de l’Iran au regard du droit international, dans l’attente de l’abolition totale de ce châtiment.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Responsable du pouvoir judiciaire, l'expression de ma haute considération.

APPELS À

Gholamhossein Mohseni Ejei
Responsable du pouvoir judiciaire
c/o Ambassade de l’Iran auprès de l’Union européenne
Avenue Franklin Roosevelt N° 15, 1050 Bruxelles, Belgique

COPIES À

Mélanie Joly
Ministre des Affaires étrangères
111, rue Wellington
Ottawa (Ontario) K1A 0A6
Aucun timbre requis
Courriel:  melanie.joly@parl.gc.ca